« Dirty Diesel » – Les négociants suisses inondent l’Afrique de carburants toxiques

La campagne porte ses fruits

C’est au rythme des percussions africaines que notre campagne « Retour à l’expéditeur » s’est achevée le 7 novembre 2016 à Genève : Public Eye a livré aux bureaux de la société le conteneur rempli d’air pollué d’Accra, avec près de 20 000 signatures. Même si la société genevoise a accepté de recevoir la pétition, elle continue de se cacher derrière le respect des lois en vigueur dans les pays où elle opère – tout comme Vitol, Addax & Oryx, Mercuria et Glencore, également concernées par les révélations de notre enquête.

Si les sociétés suisses refusent d’assumer leurs responsabilités, la campagne menée par Public Eye et ses partenaires africains a provoqué de vives réactions dans de nombreux pays, et des changements politiques sont déjà en marche. Sous la pression de l’opinion publique, le gouvernement ghanéen a annoncé en novembre 2016 l’adoption de normes plus strictes : dès mars 2017, la teneur en soufre autorisée pour le diesel importé sera réduite de 3000 à 50 parties par million (ppm), soit une teneur proche de la norme européenne (10 ppm). Cette décision essentielle a ouvert la voie aux autres gouvernements d’Afrique de l’Ouest : réunis en décembre 2016 au Nigeria afin d’empoigner cette question, les gouvernements du Nigéria, du Togo, du Bénin et de Côte d’Ivoire ont également décidé de réduire la teneur en soufre autorisée à 50 ppm, dès juillet 2017. Dans la zone ARA (Amsterdam-Rotterdam-Anvers), où la « qualité africaine » est principalement produite, l’affaire a aussi fait scandale. Le Conseil municipal d’Amsterdam a décidé d’interdire la production et l’exportation, depuis le port d’Amsterdam, de carburants présentant des teneurs en substances toxiques plus élevées que ne l’autorisent les normes européennes.

Engagez-vous à nos côtés

Avec ses partenaires africains, Public Eye poursuivra son combat contre les carburants toxiques. Les sociétés qui fabriquent et vendent ces produits dangereux, les Etats exportateurs et les gouvernements des pays concernés doivent agir sans tarder afin de garantir le respect du droit à la santé des populations.

La réaction passive des sociétés suisses de négoce montre une nouvelle fois la nécessité d’instaurer des règles juridiquement contraignantes pour que les entreprises suisses respectent les droits humains dans l’ensemble de leurs relations d’affaires. C’est pourquoi Public Eye a lancé l’initiative pour des multinationales responsables, au sein d’une coalition qui compte aujourd’hui 80 organisations. L’initiative, qui a été déposée et validée à l’automne 2016, vise à introduire dans la loi un devoir de diligence des entreprises, qui obligerait les sociétés à vérifier si leurs activités à l’étranger conduisent à des violations des droits humains ou des standards environnementaux, à prendre des mesures pour y remédier et à rendre des comptes.

Nous sommes plus que jamais déterminés à agir ici, en Suisse, pour un monde plus juste – et à écrire avec vous le prochain chapitre de la régulation des multinationales.

© Photographies : Fabian Biasio, 2016
© Photographies : Carl De Keyzer, Magnum, 2016

Pour mettre un terme au commerce de carburants toxiques